QUI EST ROBERT DESNOS ?

| Robert Desnos | Biographies | Graphies et signatures

Robert Desnos

Robert Desnos (1900-1945) est un poète que la diversité de son œuvre, sa personnalité rayonnante et passionnée ont rendu populaire au point qu’il est le personnage de plusieurs romans et que nombre d’écoles arborent son nom.

Robert Desnos, photographie de Man Ray, 1922

Les « sommeils hypnotiques » à l’automne 1922 ainsi que les équations vertigineuses qu’il attribue alors à son double poétique, Rrose Sélavy (dont il emprunte le nom à Marcel Duchamp), révèlent le poète qui « parle surréaliste à volonté », selon la formule de Breton en 1924.

Apprenez que la geste célèbre de Rrose Sélavy est inscrite dans l’algèbre céleste

Ces énoncés ludiques, dessins et tracés inspirés par l’automatisme s’accompagnent alors d’explorations linguistiques plus systématiques, dans le sillage de Marcel Duchamp et de Raymond Roussel, recueillies dans « L’Aumonyme » et « Langage cuit ». Après sa rencontre avec la chanteuse Yvonne George, à l’automne 1924, Desnos écrit les poèmes lyriques de l’amour sans espoir (« A la Mystérieuse », 1926, « Les Ténèbres », 1927), en même temps que les textes à la fois macabres et drôles du recueil C’est les bottes de sept lieues cette phrase : je me vois illustré par André Masson en 1926. La conjonction de l’érotisme et de la mort se retrouve dans ses récits : Deuil pour deuil en 1924 où Desnos enterre plaisamment ses amis et lui-même après le naufrage de la Sémillante et La Liberté ou l’amour ! en 1927, qui s’ouvre sur l’épitaphe de l’auteur et tresse à la poursuite érotique d’un couple  mythique les combats épiques de Bébé Cadum et Bonhomme Michelin, les grands moments de la Révolution française ou les aventures scabreuses du club des buveurs de sperme puis d’un pensionnat de jeunes filles, jusqu’au grand naufrage final. Salué comme le « prophète » du surréalisme dans le Manifeste du surréalisme de 1924, il s’éloigne cependant peu à peu de Breton dont il ne partage pas les choix politiques : en 1929, la rupture est consommée. Corps et biens, l’année suivante, réunit les poèmes et recueils inédits de ses années surréalistes auxquelles Desnos est souvent identifié.

Pourtant, il a continué de poursuivre sa recherche de « poète libre » où qu’elle le mène, de l’alexandrin hugolien, rimbaldien au sonnet en argot, du poème métrique à la chanson burlesque, mélancolique ou malicieuse. Libre aussi sa quête amoureuse aux côtés de Youki (Lucie Badoud), alors compagne du peintre Foujita ; sans renoncer à aider comme il le peut « l’étoile » Yvonne George, jusqu’à sa mort en 1930, il entre dans le tourbillon de la vie festive de la Sirène, dont témoigne le beau manuscrit de ses poèmes illustrés de ses propres gouaches, Le Livre secret pour Youki.

Auteur de récits, romans (Le vin est tiré, en 1943), cantates, scénarios, de recueils de poésies enfantines et de très nombreuses chansons, Desnos a aussi été journaliste, critique de livres, de cinéma et de disques, passionné de jazz et de « son » cubain. Appelé à la radio par Paul Deharme, il a laissé le souvenir d’émissions radiophoniques novatrices financées par des couplets publicitaires désopilants. Parmi celles-ci, « La clef des songes » en 1938 prétend interpréter les récits de rêves que les auditeurs lui adressent.

Desnos reste avant tout poète, en quête de nouvelles voies dont témoignent les poèmes des Sans cou (1934), de Fortunes (1942), Etat de veille (1943), Contrée (1944), les poèmes pour les enfants, ceux de Paul et Lise Deharme, le fils de Darius Milhaud, Daniel, ou encore  les Chantefables et Chantefleurs, les poèmes où l’inspiration mythologique (Le Bain avec Andromède) et la langue savante alternent avec les couplets en argot pendant l’Occupation (Calixto) et les vers comptés et rimés avec les vers dits libres, car  « ce n’est pas la poésie qui doit être libre, c’est le poète ».

Si l’on connaît les circonstances tragiques de la mort du poète au moment de la libération du camp de Térézin en 1945, on ignore parfois son action dans la résistance, que révèlent, dans les archives numérisées, des listes d’adresses, des textes à double entente ainsi que des correspondances avec Youki ou les lettres d’Alain Brieux.

A l’image du rêveur dont les yeux se perdent dans la vision intérieure, du « bon copain » généreux et grand vivant, de l’amoureux « plus ombre que l’ombre » de celle qu’il aimait, il faut, pour ne pas manquer le rendez-vous avec Desnos, superposer l’homme de désir troublé par les récits d’enfance, dont l’imaginaire reste hanté de naufragés dans la tempête, de trappeurs et d’Indiens dans les espaces sauvages des nouveaux mondes, traversé de fantasmes sado-masochistes. Son « Art poétique » sous l’Occupation n’a rien de lénifiant : le souffle lyrique est traversé par la colère, les sons martèlent le vers comme autant d’injures et de coups. Le poète amoureux et l’homme d’action mû par l’amour de la liberté, parfois impulsif quand le saisit l’indignation face à l’injustice, chez lui ne font qu’un.

M.-P. Berranger

Biographies

Biographie générale

  • Marie-Claire Dumas, « Essai biographique » dans Robert Desnos ou l’exploration des limites, Klincksieck, 1980, p. 17-291.
  • Anne Egger, Robert Desnos, Fayard, 2007, 1165 p.

Écrits biographiques

  • Devolder, Eddy et Mahieu Jean-Marie, Les Derniers mois de Robert Desnos,  Esperluète, Noville-sur-Mehaigne, Belgique, 1997.
  • Louis, Frère, « Robert Desnos et Belle-Ile en Mer, rêve et réalité », Le Chant de la Sirène, n° 20, Blainville-Crevon, 3ème trimestre, 2006.
  • Léon-Gabriel Gros, « Deux morts exemplaires », Les Cahiers du Sud, 1949.
  • Lartigue Pierre, « Desnos meurt à Terezin, le 8 juin 1945 », Colloque de Reims, septembre 1995.

Collectifs

  • Le Convoi des tatoués, Amicale des déportés tatoués du 27 avril 1944, Viry-Chatillon, 1993.
  • Sur les pas de Robert Desnos, Compiègne-Terezin, 1944-1945, dans le cadre d’un projet Comenius, réunissant des élèves français, tchèques et slovaques, 2014.

Les livres dont Robert Desnos est le héros

  • Dominique Desanti, Robert Desnos, le roman d’une vie, Mercure de France, 1999.
  • Gaëlle Nohant, Légende d’un dormeur éveillé, Babelio, Prix des Libraires 2018.
  • Ysabelle Lacamp, Ombre parmi les ombres, Bruno Doucey, 2019.
  • Thierry Clermont, Barroco Bordello, Le Seuil, 2014.
  • Benoît Damon, Après les cendres, Genève, Héros-limite, 2021.

Graphie et signatures

La graphie de Desnos varie considérablement selon son degré de précipitation. Les finales des mots peuvent s’achever en un trait descendant où ne se distinguent plus les lettres, notamment dans les écrits sous hypnose. Elle peut prendre à l’inverse une allure appliquée, scolaire, avec des lettres bien moulées dans des manuscrits de copie destinés à la publication, envoyés à une revue. Certaines lettres comme les d, les m, et les capitales, connaissent des variantes importantes.

Le plus souvent le poète ne porte pas les accents (sur le à, les é, è, ê). Les capitales en début de vers ne sont pas systématiques, non plus que la ponctuation. On observe sur un recueil dont il a lui-même conduit la publication, Corps et biens, que les accents sont rétablis ainsi que certaines capitales de début de vers, dans une volonté d’homogénéiser la strophe.

 

Retrouvez les œuvres de Desnos sur notre site en cliquant sur le bouton ci-dessous